La salle d'orfèvrerie impériale russe du Musée Royal de l'Armée et
d'Histoire Militaire de Bruxelles
(première partie)
Le Musée Royal de l'Armée et d'Histoire Militaire de Bruxelles
(Belgique) a la particularité de posséder une salle d'orfèvrerie russe
de l'époque des deux derniers tsars, à savoir Alexandre III et Nicolas
II.
Il peut paraître étrange qu'un musée consacré au passé militaire de la
Belgique, aux conflits des deux dernières guerres, à l'époque
napoléonienne, aux armes à systèmes, aux armures haute époque, à
l'aviation, à la marine, aux blindés etc… possède une salle aux trésors
d'orfèvrerie russe.
Le musée Royal de l'Armée de Bruxelles est l'un des plus vastes du
monde. Situé dans un cadre prestigieux, il est le musée le plus visité
de Belgique.
Il faut plusieurs jours pour en faire le tour et sa bibliothèque,
fréquentée chaque année par des milliers de chercheurs, est des plus
complètes, renfermant des ouvrages et des archives très rares, voire
uniques.
L'histoire des Cosaques est intimement liée à celles des empereurs. En
effet, les Cosaques constituaient des régiments d'élite affectés, entre
autre, à la garde des souverains et de leur famille. Celui de la Garde
Impériale fut créé par Catherine II en avril 1775.
C'est ainsi qu'à la célèbre bataille de Leipzig, en septembre 1813, les
cosaques se sacrifièrent pour retarder l'arrivée des troupes alliées
alors que le roi de Prusse, l'empereur d'Autriche et le tsar Alexandre Ier
étaient encerclés par des cuirassiers français les ayant repérés sur une
colline. Le geste de ces cosaques permit de sauver ces monarques et on
peut deviner ce qui se serait passé si les troupes de Napoléon les
avaient capturés. Le sort de l'Europe en aurait été modifié !
Les Cosaques furent auréolés de gloire et couverts de cadeaux, de pièces
d'orfèvrerie entre autre, qui furent déposés dans les vitrines de leur
mess, celui des Officiers de la Garde à St Pétersbourg. Elles
rejoignaient ainsi d'autres présents offerts par les souverains à
d'autres occasions ainsi que des cadeaux de prestige, tous en argent,
offerts à des officiers au moment de leur mise à la retraite et que la
coutume voulait qu'ils les déposent dans les vitrines de leur mess.
La guerre civile russe de 1917 vit la victoire des troupes communistes
de l'armée rouge contre les armées blanches. Les régiments des Cosaques
se battirent jusqu'à la fin mais durent, avec d'autres russes blancs,
émigrer en Europe. C'est ainsi que les survivants du Régiment des
Cosaques de la Garde arrivèrent à Paris après un voyage éprouvant à
travers l'Europe en guerre. Installés à Paris dans un pavillon de
banlieue qu'ils louèrent à Courbevoie, ils n'eurent qu'une seule idée :
faire revenir leur trésor régimentaire qu'ils avaient emporté avec eux
et entreposé en Yougoslavie mais ils durent attendre quelques années
pour le rapatrier faute de moyens financiers suffisants.
La montée du Front Populaire en France en 1936 leur fit craindre la
saisie de ce trésor par les communistes français et son renvoi en URSS.
Ils demandèrent donc au roi des belges, Léopold III, de leur permettre
de déposer, en 1938, leur trésor régimentaire au Musée de l'Armée de
Bruxelles où il n'avait rien à craindre, la Belgique n'étant pas taxée
de pays sympathisant du communisme.
Depuis cette époque ce trésor se trouvait dans les vitrines du musée, à
côté d'armes, uniformes et équipement de l'armée russe en 1914, et
vraiment peu mis en valeur.
La prise de conscience de ce fait par l'Association des Amis du Musée
Royal de l'Armée de Bruxelles, et suite à l'insistance des propriétaires
de ce trésor à Paris, il fut décidé d'exposer ces pièces dans un cadre
digne d'elles : une nouvelle salle particulière de conception ultra
moderne due au talent du suisse (d'origine anglaise) : Ian Ashdown,
spécialiste mondial de conception muséale en collaboration avec la
meilleure firme belge de réalisation de vitrines d'exposition et
d'éclairage, connue dans le monde entier : la firme Meyvaert de Gent.
Cette salle fut inaugurée le 2 octobre 2001 par le ministre belge de la
Défense, l'ambassadeur de la Fédération de Russie, les attachés
culturels et un parterre de personnalités civiles et militaires. Cette
salle, plongée dans le noir afin de faire ressortir les pièces exposées,
est composée de diverses parties: uniformes rares dont ceux de trois
empereurs et du tsarévitch; bannières et drapeaux de régiments ; armes
portatives ; coiffures ; décorations et médailles et
bien
sûr la partie orfèvrerie où la pièce de choix est sans conteste le
bol à punch de plus de 50 kgs, en style rocaille et orné de
médaillons en porcelaine peinte représentant la bataille de Leipzig
et les portraits des différents tsars depuis la création du Régiment
des Cosaques de la Garde. Cette oeuvre d'art unique, à cuve
intérieure en argent vermeillé, est d'une valeur inestimable. Elle
fut offerte par l'Association de la Noblesse du Don au régiment des
Cosaques de la Garde. |
Et
que dire de cette série de 22 trompettes différentes, dues au talent
du facteur d'instrument Romo qui n'employa pas du laiton mais de
l'argent au titre de 84 zolotnikis, en partie vermeillé, pour
confectionner ces instruments. La sonorité due à l'argent est
incomparable, surtout lorsque la Musique des Cosaques de la Garde
joue la Marche Nuptiale de Mendelssohn qui n'est autre que la marche
du Régiment |
On s'émerveille devant ces grands kovchs décorés de façon incroyable
et sortant des ateliers de l'orfèvre impérial Ovtchinokov, ou ce bol de
Fabergé, ou les plats et assiettes, les chandeliers, les énormes coupes
à fruits; la pendule d'argent; l'encrier; les louches sentant le style
art nouveau; les gobelets à vodka en forme de casques miniatures de
lanciers et tant d'autres pièces uniques ciselées, gravées, incrustées
alliant toutes les techniques russes du champlevé, niellé, cloisonné,
émaillé, toutes sortant d'ateliers d'orfèvres impériaux. Plus de 200
pièces de grande valeur. Une salle à voir absolument par tous les
amateurs de très très belle orfèvrerie russe du XIXe s.
Claude-Charles Feÿs
Administrateur de la SRAMA
Amateur d'orfèvrerie - Expert
Membre du Groupe de Travail Salle Russe
Société Royale des Amis du Musée Royal
de l'Armée et d'Histoire Militaire, Bruxelles
Le Musée Royal de l'Armée et d'Histoire Militaire de Bruxelles se
situe 3, Parc du Cinquantenaire à 1000 Bruxelles.
Ouvert tous les jours sauf le lundi.
Entrée gratuite. Guides sur demande.Tél : 00-32-27377811
Société Royale des Amis du Musée Royal de l'Armée et d'Histoire
Militaire (SRAMA). Tél : 00-32-27377890
Fax : 00-32-27377892 Email : srama@euronet.be
La famille impériale russe
Le Tsar Nicolas II, la Tsarine Alexandra Fiodorovna (tenant le
tsarevitch dans ses bras) et les Grandes Duchesses (Photo originale
faisant partie de la collection de la salle russe du Musée Royal de
l'Armée et d'Histoire Militaire de Bruxelles)
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Photos copyright Raoul Verbist
à suivre dans la deuxième partie
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